2018
C’est l’année où je finis mon master recherche sur le travestissement au XXe siècle et que je bascule dans ce monde un peu bizarre de la thèse.
C’est aussi l’année où je deviens amie avec Samil, une personne incroyable et qui aura toujours une place spéciale dans mon cœur. Samil commence dans le drag et en rigolant me dit que je devrais organiser une expo et/ou un show à la fac de Pau pour la faire performer mais aussi pour voir la tête des gens. L’idée elle était posée dans un coin de ma tête, et oui j’y pensais souvent. Je n’avais jamais organisé de tel événement, des expositions oui mais jamais de cette envergure et jamais avec un show. Au vu de mon sujet de thèse (« Autoreprésentations queers dans la photographie et la performance de 1980 à aujourd’hui »), il était cohérent que je me mette à la tâche à la fois pour valoriser ma recherche, mais aussi dans une logique de don/contre don avec les artistes qui m’accordent du temps.
Comment résister à Azada ?
Et me voilà partie pour organiser cette exposition avec un show-tentative où Azada et Vitale ont pu faire leurs premières performances. L’ambiance était enflammée et le public était ravi même si le show était court. Nous étions content-es de voir le succès de la soirée, on ne s’attendait pas à autant de monde.
Je pose l’idée d’une exposition en 3 édition, dans l’idée : 2018, 2019 et 2020









2019
Nous voilà à la seconde édition, avec les précieux conseils de l’équipe de la Centrifugeuse je me lance dans un show plus ambitieux. Plusieurs artistes venu-es de tout l’état français, plus de photographies exposées, je sors complètement de ma zone de confort. C’est un exercice difficile d’exposer et d’inviter des artistes qu’on admire. Ils/elles ont été compréhensifs et compréhensives envers mes hésitations et les petits soucis logistiques qui jonchent les jeunes projets. J’ai pu faire des rencontres incroyables, jamais je n’oublierai cette soirée. Et je pense que je ne suis pas la seule. La salle était comble, soit 180 personnes, je n’en revenais pas du monde. Nous avons pu voir beaucoup de jeunes queers, certain-es avec leur(s) parent(s), avec leur partenaire. Ils/elles étaient très enthousiastes et beaucoup ont tenu à me le dire et à m’expliquer pourquoi cet événement était important. Cette soirée a été décisive dans ma façon d’envisager ce cycle d’expositions, aussi dans celle d’appréhender l’exposition comme support de solidarité et de soutien communautaire.
Dans une ville comme Pau, les shows drag sont très rares, réduits en terme de nombre d’artistes et de public mais aussi en terme de place. On remerciera ici l’équipe du DK Bar qui redynamise notre milieu au centre de Pau.
















2021
Sans surprise l’année a été suspendu comme pour beaucoup, suspendu aux discours du gouvernement, aux courriers de l’ARS, aux nouvelles règles et aux autorisations de sortie. J’ai ressenti plus que jamais le poids de ma classe sociale : j’ai passé l’année à travailler en EHPAD, à faire des heures et des jours supplémentaires, être épuisée et continuer parce que les résident-es ne peuvent rester seul-es, qu’il faut aider l’équipe. A côté de ce quotidien fait de violence symbolique et de burn out, mes collègues écrivaient leur thèse, faisaient des stories de leur yoga, de leur repas healthy, du pain fait maison, et tous ces trucs à la mode en 2021. Je suis contente pour elles et eux qui ont pu avancé, ma haine contre le système capitaliste et le désengagement de l’État dans l’enseignement supérieur et la recherche n’a été que décuplé. J’ai quitté mon emploi en EHPAD en janvier 2022, une fois les grosses vagues passées, entièrement consumée par le burn out.
Pour mes projets 2021 a été compliqué évidemment, l’exposition « Send Nudes » a été fermé quelques jours après son ouverture, sans savoir si on pourrait la ré-ouvrir, laissant les photographies dans la salle. Tout le reste étant reporté à un futur incertain, a fortiori pour le milieu de la culture.
2022
On laisse 2021 derrière nous et on se remet en selle pour monter une nouvelle exposition, un nouveau show mais les séquelles sont toujours là. Qu’importe, je termine les derniers détails depuis ma chambre d’HP, sous anxiolytiques. Je demande une permission de sortie pour monter l’exposition et être au show. Expérience dystopique. D’une hétérotopie à l’autre.
Cette troisième édition était censée être la dernière. Nous avons eu la chance de travailler aux côtés d’AIDES64 et que notre événement entre dans le programme de Mars Attaque. Nous avons pu exposer à la fois à l’université et à la médiathèque André Labarrère et ainsi diversifier notre public. Le show du vernissage a été accompagné d’un autre à la médiathèque le samedi matin et le public habituel a pu découvrir les artistes en performance. Les artistes ont eu un accueil intéressé et chaleureux. Ici la démocratisation des pratiques queers était totale, nous sortons de l’hétérotopie communautaire pour se confronter à un public éclectique et non connaisseur, cela peut représenter un risque mais qui ne s’est pas concrétisé ici. Expérience à renouveler.













2023
Je n’étais pas censée organisée une 4e édition, ce n’était pas prévu. Mais le public est demandeur, nous n’avons pas cessé de recevoir des questions sur le retour de l’événement cette année; jusqu’à la Nuit européenne des chercheurs et des chercheuses, où j’ai pu rencontré des personnes et des familles venues à plusieurs éditions qui étaient impatientes de la prochaine. C’est un travail qui prend du temps, mais qui reste nécessaire, a fortiori depuis les récentes attaques contre les artistes drag outre-Atlantique et dans l’Etat Français.
C’est aussi à nous de soutenir nos artistes, de les inviter, de les rémunérer, de leur permettre de se produire dans de bonnes conditions.
Comme l’année dernière l’équipe est étoffée par Léa Sangy en assistante et par trois stagiaires finissant leur L3 Histoire de l’art à l’université de Pau, qui ont été mes étudiant-es au semestre dernier : Lola Lees-Cantel, Guillaume Sarraille–Jaud et Léa Gey.
Nous comptons sur le soutien de notre association Art&Fac et sur les conseils de l’équipe de la Centrifugeuse. Enfin, l’université de Pau, le CROUS Bordeaux et la région Nouvelle-Aquitaine nous renouvelle leur soutien financier pour cette édition.

We’re here, we’re queer #4
Pour cette édition nous aimerions questionner les liens entre le milieu drag et l’histoire de l’art plus conventionnelle : autant dans la fabrication des images que dans celle des discours.
Pour l’aspect fabrication nous avons décidé de donner la parole à plusieurs photographes qui travaillent régulièrement avec des artistes drags pour documenter leur persona et leurs performances publiques.
Concernant la mise en discours, c’est un dialogue (parfois de sourd) entre artiste et historien-nes de l’art. Comment les artistes parlent de leur démarche ? Comment les historien-nes de l’art la rapportent ? La construction du discours est essentielle dans « ce qui reste » des performances. La spécificité de cette technique artistique est bien qu’elle n’existe « que » sur le moment, « que » dans un lieu. Tou-tes les artistes ne répètent pas leur performance, toutes les représentations ne sont pas identiques. Comment en parler si personne ne pourra le revoir dans les mêmes conditions ? A quel point l’environnement impacte la production et la réception d’une performance ?
L’an dernier nous avions travaillé la notion d’archives politiques et artistiques, nous prolongeons donc avec la mise en discours qui inscrit la performance dans un récit qui « restera ».
Nous reviendrons sur le travestissement depuis le début du XXe siècle en faisant appel à des artistes connu-es comme Claude Cahun, Pierre Molinier ou encore Michel Journiac que nous mettrons en pendant au travail des artistes exposé-es. L’équipe produit des textes sur certain-es artistes afin d’approfondir les images. Les interviews permettront de donner la parole aux artistes sur leur propre pratique. Cela permettra pour le public de penser la pratique du drag dans une histoire de l’art élargie et de poser la question de la légitimité, et de la polysémie du terme « artiste ».
Le programme : 15/16/17 mars
15 mars – Make up as drag
Pour ce premier jour de l’événement nous proposons un atelier de maquillage animé par trois artistes drags : La Bondage, Daemon Schiele et Yax Ferri. Le public pourra réserver avec l’un-e d’entre eux/elles et suivre ses conseils pour se maquiller en drag. L’expérience sera intimiste et prendra place au sein de l’université (accessible PMR).
Il est gratuit,sur réservation et dans la limite des places disponibles : mhkzo@outlook.fr (objet : Queer make up)
16 mars – Le vernissage et le show (Pau)
On se donne rendez-vous à 18h00 pour l’ouverture de la salle d’exposition. Le public pourra déambuler dans la salle et le patio de la Centrifugeuse en profitant d’un bus végétarien et d’un bar sans alcool.
Le show qui suit sera animé par La Bondage, comme les années précédentes. Nous vous présenterons une dizaine d’artistes
Le show commencera à 19h00, gratuit il sera néanmoins dans la limite des places disponibles. Nous distribuerons un bracelet d’entrée aux premières personnes arrivées jusqu’à épuisement. La salle est accessible aux personnes PMR, nous vous conseillons alors de nous envoyer un mail en amont afin de prévoir l’emplacement (dans ce cas votre place sera réservée peu importe votre heure d’arrivée). Si vous avez besoin d’aménagements n’hésitez pas à nous contacter pour que nous essayons de faire au mieux. (mhkzo@outlook.fr ; objet : Queer show)
17 mars – Le deuxième show (Tarbes)
Pour faire durer le plaisir nous vous proposons un second show mais sur Tarbes. Nous nous essayons à une nouvelle ville en espérant y trouver le même accueil incroyable qu’à Pau. Pour les palois-es voulant venir nous posterons un message sur l’événement facebook pour que le public puisse proposer / demander des covoiturages.
Nous vous donnerons les détails de cette soirée très prochainement.
Du 17 au 30 mars – L’exposition
Les photographies et cartels de présentation resteront visibles à la Centrifugeuse du lundi au vendredi de 10h à 17h30.
Si vous souhaitez une visite de groupe vous pouvez nous contacter : mhkzo@outlook.fr (objet : Queer visite)
Pour toutes questions -> mhkzo@outlook.fr (objet : Queer)


