Féministes tant qu’il le faudra
La « Journée internationale des femmes » est une proposition formulée la première fois en 1910 par Clara Zetkin (marxiste allemande) à la IIe conférence internationale des femmes socialistes. Elle cherche à barrer la route aux féministes bourgeoises et à mobiliser les femmes « en accord avec les organisations politiques et syndicales du prolétariat dotées de la conscience de classe ». C’est par la révolution de 1917 et surtout la grève des ouvrières de Saint-Pétersbourg que le 8 mars se met en place. Il faudra attendre 1977 pour que les Nations Unies reconnaissent officiellement cette journée, et 1982 pour le France.
Afin de perpétuer l’histoire des luttes féministes, Solidaires étudiant·e·s Pau Occitanie syndicat de lutte et l’association des étudiant·e·s du département Histoire de l’art et Archéologie de l’université de Pau ont décidé d’organiser un cycle d’exposition autour du corps féminin et de l’engagement féministe en art. Nous remettons en cause l’emprise du patriarcat sur les corps des femmes, et nous saluons les initiatives féministes pour tendre à la totale disposition de leurs corps. Depuis les années 1990 le corps est devenu, en art, une référence, une sorte de « résistance au pouvoir ». Les artistes femmes se sont emparées des mediums tels que la photographie, la vidéo et la performance. Ces outils présentaient l’avantage de mettre en avant le corps mais aussi celui de ne pas encore être accaparés par les artistes hommes. Les techniques ont depuis évolué, mais le but reste le même : centrer son travail sur l’identité, son identité.

Kivan Bay
L’année dernière, du 5 au 9 mars, s’est tenue « Grosse et fière, Le corps féminin comme engagement féministe ». Cette exposition centrait son propos sur les diktats liés au poids et à la silhouette que subissent les femmes. Nous avions invité plusieurs femmes artistes qui utilisent le dessin graphique afin de représenter des femmes grosses avec une vision émancipatrice. Sortant du préjugé que les femmes grosses sont malades et malheureuses, ces images présentaient des femmes heureuses, épanouies et combatives. L’exposition a été une réussite puisqu’elle a rassemblé près de 200 personnes sur 5 jours. Elle est d’ailleurs invitée à l’université Jean Jaurès par le syndicat étudiant l’UET entre le 25 février et le 14 mars 2019 [+].
« La dissimulation du corps, dans l’art moderne, est liée, idéologiquement et dans la pratique, au patriarcat dominant et aux aspects colonialistes, hétérosexistes et de classe qu’il a engendrés et qu’il pérennise »
– Amelia Jones, dans JONES Amelia et WARR Tracey, Le corps de l’artiste, Paris, Phaidon, 2005, p20
Photographie par Lea [+]
Cette année, entre le 4 et le 8 mars, nous avons décidé de mettre à l’honneur trois artistes racisé·e·s perçu·e·s comme femmes. Elles subissent une double oppression : à la fois la misogynie et le racisme. Notre but est d’extraire l’art d’un système androcentré, c’est-à-dire un système où l’homme est pris comme référence unique, et ce en se cachant derrière la notion d’universalité. Nous retrouvons le même système d’invisibilisation avec la question de la race, où les artistes femmes étudiées sont en priorité des femmes blanches.
Dans le cadre des expositions féministes de la semaine du 8 mars nous essayons d’adopter une réflexion intersectionnelle sur la position d’artiste.
« L’intersectionnalité est donc avant tout un outil diagnostic permettant de déceler le caractère cumulatif et aggravant des violences de race, de genre et de classe »
– Hourya Bentouhami-Molino, Race, cultures, identités. Une approche féministe et postcoloniale, p.164
Comme son nom l’indique, l’exposition se centre sur le terme « culture ». Qu’entendons-nous par ce mot ? Quel rapport les artistes entretiennent-elles avec ? Comment leur(s) culture(s) transparaissent-elles dans leur travail artistique ? Considèrent-elles leur production artistique comme une forme d’engagement politique ?
Cette exposition sera l’occasion de créer un espace de discussion sur les questions de féminisme et des luttes anti-racistes, et la place de l’art comme production politique.

Honorine Boudzoumou, vue par Muskmosa
Lectures indicatives
Pap Ndiaye, La condition noire, Essai sur une minorité française (2008)
Hourya Bentouhami-Molino, Race, cultures, identités. Une approche féministe et postcoloniale (2015)
Commissariat d’exposition par : Marion Cazaux et Juliette Ducrocq,
événement proposé conjointement part Art&Fac et Solidaires étudiant.e.s Pau Occitanie